Résumé
"À l'avant-garde de ce qu'on pourrait appeler le théâtre de combat, LeRoi Jones s'est fait le chantre de la révolte des Noirs américains contre l'ordre, l'hégémonie et la culture des Blancs. Né en 1934 dans le New Jersey, il s'est laissé attirer d'abord par les valeurs blanches et a été professeur, poète, critique musical et l'un des dandys les plus notoires de Greenwich Village, avant de faire volte-face pour se joindre activement, par la littérature et par l'action, à la révolution noire. De ce théâtre essentiellement politique, dont la violence masque mal une certaine nostalgie du passé et l'horreur de l'inévitable guerre civile, ces deux pièces en un acte sont les plus importantes, et leur succès a été considérable, tant aux États-Unis qu'en France. Le Métro fantôme, notamment a obtenu en 1964, à New York, l'Obie Award, récompense décernée à la meilleure pièce de l'année, et a rallié à Paris la quasi-unanimité de la critique. C'est, dans l'obscurité ferraillante d'un tunnel de métro new-yorkais, une nouvelle traversée du Vaisseau fantôme de Wagner. Clay, le Noir, en est le nocher, condamné lui aussi à errer jusqu'au jour où il sera délivré par l'amour ; la Senta de ce Daland noir est blanche et de leur rencontre dépendra, un instant, la rédemption du jeune homme. Cela n'aura, bien sûr, pas de suite. Le petit-bourgeois noir va singer les Blancs, très mal, devant une fausse intellectuelle blanche, qui singera les Noirs plus mal encore. En s'inversant, l'incompatibilité s'aggravera et, mettant fin au simulacre, Clay redeviendra un Noir à peau entière pour choisir la révolte. Quant à L'Esclave, ce pourrait être une fable, un jeu d'histoire-fiction à la manière du Meilleur des mondes ou de 1984. Mais il se pourrait aussi que ce conte soit en fait une anticipation, car rien n'est autant plausible que cette vision d'une guerre ouverte entre Blancs et Noirs, aux États-Unis, dans le dernier quart de ce siècle." Éric Kahane.