Le jeu

Qui est celui qui doit jouer ? L'homme, répond Jacques Henriot. Il en va du sens de son existence. Cette idée n'est évidemment pas neuve mais elle trouve ici l'une de ses démonstrations les plus achevées, en dialogue avec les sciences humaines et dans la perspective philosophique ouverte par l'existentialisme de Sartre. Dans cet ouvrage du jeune Henriot, publié aux PUF en 1969 et épuisé depuis plusieurs décennies, nous suivons une analyse particulièrement claire et aboutie, à la fois pédagogique et critique, grâce à laquelle se comprend dans toute sa portée l'importance transversale de la question du jeu. En parcourant les corpus, Henriot identifie les définitions et discute les distinctions pour progressivement élaborer une problématisation propre : le jeu n'est pas qu'une affaire d'objet (le jouet) ou d'activité (le jouer), c'est d'abord une « attitude » par laquelle nous voyons le monde d'un œil ludique, et grâce à laquelle l'homme se fait. Après Caillois, Huizinga ou Bateson une nouvelle définition du jeu naît dans ces pages, qui nourrira, non sans évoluer, l'œuvre d'Henriot, et toutes celles et ceux qui jusque dans les jeux les plus actuels, continuent d'en révéler la pertinence. Cette réédition du Jeu, corrigée et augmentée d'un appareil critique, est accompagnée d'une préface de Gilles Brougère (professeur de sciences de l'éducation à l'université de Paris XIII où il est responsable de la spécialité Sciences du Jeu du master Sciences de l'éducation) contextualisant l'importance de l'ouvrage dans l'œuvre de Henriot et le champ des études sur le jeu. La postface de Mathieu Triclot (maître de conférences en philosophie à l'Université de Technologie de Belfort-Montbéliard, auteur de Philosophie des jeux vidéo, Zones, 2011) prolonge le commentaire notamment en direction de la fécondité de l'idée d'un primat du play (l'attitude ludique) sur le game (la structure des règles) pour l'analyse des jeux vidéo, témoignant ainsi de l' actualité intacte de cet ouvrage et de l'utilité de sa réédition au regard des problématiques contemporaines.